L’OMBRE ET LA LUMIÈRE DANS L’ARCHITECTURE ROMANE

Texte lu par Maïté Biau

 

La plupart des premières chapelles romanes sont très sombres. Les ouvertures romanes sont très étroites, comme on peut le voir ici dans la première travée.

Pour les moines la chapelle était comme un sépulcre.

Cette ombre était vaincue chaque matin avec l’apparition de la lumière du levant, par

la fenêtre centrale de l’abside. La vie surgissait avec la lumière.

Pour bien capter le soleil levant, les maîtres d’œuvre prenaient grand soin de déterminer les axes cardinaux sur le terrain afin d’implanter correctement le sanctuaire qu’ils avaient le charge de construire.

On plantait une belle perche au centre de l’emplacement de la construction et on marquait au sol l’extrémité de l’ombre du bâton au sol. Tous les matins, les rayons du soleil disaient, symboliquement, la Résurrection du Christ. L’autel était disposé de telle sorte que ces rayons venaient l’illuminer au moment de l’Eucharistie matinale.

Une finalité symbolique, qui se superposait à ce que nous venons d’entendre sur le schéma basilical. Le chœur inondé de lumière donnait vie à toute la chapelle. Le sépulcre n’était plus mort, il disait la Résurrection.

Dans le déroulement du rythme des offices des heures, les Laudes, premier office du jour, comportent le chant de la prière de Zacharie, le Benedictus, qui, après la présentation de Jésus au Temple, évoque :

l’effet de la tendre miséricorde de notre Dieu,

Grâce à laquelle nous a visités, d’en haut, le Soleil levant,

Pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et l’ombre de la mort,

Pour diriger nos pas dans la voie de la paix. « 

La pensée symbolique sur l’ombre et la lumière a marqué profondément le travail des architectes Romans. Ici, dans notre cathédrale, nous ne pouvons plus en lire l’expression romane.

À Saint Guilhem du Désert, la lumière de l’aube illumine l’autel. Mais il y a plus : au solstice d’été, à midi, les taches de lumière des baies de la façade Sud viennent au milieu de la nef ponctuer exactement l’axe de montée vers l’autel. Une lumière qui guide sur le chemin du salut.

À Béziers, trois églises romanes :

  • Saint Aphrodise n’a plus son chœur roman, remplacé par ce grand chœur gothique au XIVème siècle.
  • La Madeleine : deux des trois ouvertures romanes ont été agrandies au XVème siècle, mais on peut encore apprécier la lumière du Levant dans sa finalité symbolique de la venue du Ressuscité.
  • Saint Jacques : les embrasures initiales ont été élargies au XVIIIème siècle, mais on peut encore contempler le « miracle » du Levant .

Il faut surtout admirer le somptueux décor extérieur de l’abside réalisé pour donner toute sa solennité à l’entrée du Christ au matin de sa Pâque, renouvelé chaque jour. C’est cette « porte solennelle » qui justifie l’existence de cette église et en donne tout le sens pour les fidèles. Une finalité symbolique qui permet de comprendre la raison profonde de cette abside si richement parée.

 

On ne peut parler de l’architecture romane sans évoquer Bernard de Clairvaux (1090-1153).

Il va imposer à ses moines de Clairvaux une grande austérité. Il veut une architecture dépouillée dont rien ne viendrait distraire la vie des moines.

Cela aboutira à ces magnifiques abbayes cisterciennes dont la rigueur et la sobriété laissera resplendir la magnificence des proportions, les remarquables qualités acoustiques et ces subtils jeux de lumière.

Nous pouvons admirer ces précieuses qualités dans ces chefs d’œuvres que sont les trois sœurs provençales : les abbayes du Thoronet, de Sénanque et de Sylvacane.

Pour terminer cette première séquence, une citation de Saint Paul, dans sa lettre aux Éphésiens (5, 8) :

Autrefois vous étiez ténèbres,

et maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur.

Marchez comme des enfants de lumière!

 

MERCI DE VOTRE ATTENTION